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vendredi 30 décembre 2016

Les îles de la mer Intérieure, îles d'art contemporain

Si l'île de Naoshima, probablement la plus connue en la matière, a déjà fait l'objet d'un article, il faut tout de même savoir que plusieurs autres îles de la mer Intérieure sont à l'origine d'une manifestation artistique qui vaut le détour: la Triennale d'Art Contemporain. Cet événement a lieu tous les 3 ans (comme son nom l'indique) depuis 2010, et se tient sur 12 îles. C'est donc un phénomène plutôt récent, que j'ai eu la chance de découvrir pour la première fois en 2016. Malheureusement, pour ce qui est des égouts, la récolte n'est pas exceptionnelle... Et je dois admettre que je n'ai pu visiter que 5 des 12 îles; peut-être les 7 autres étaient-elles mieux fournies? Concrètement, je suis allée sur les 5 îles accessibles depuis les ports de Takamatsu (ville et plaques déjà vues ici; pour la peine, c'est du haut niveau) et Uno. En l'occurrence, c'est à Uno que se trouve le plus beau nouveau spécimen:
Outre Naoshima, les îles visitées sont: Shōdoshima, Teshima, Ogijima et Megijima. Histoire de ne pas rentrer totalement bredouille, j'ai quand même trouvé une vieille plaque à Ogijima:
Et voici une autre version à Megijima:
Mais pour bien se rendre compte du manque d'originalité en matière de plaques, voici un petit échantillon, à Ogijima:
Il faut reconnaître que c'est plutôt moche. Mais évidemment, il ne faut pas s'arrêter seulement aux égouts: les îles ont beaucoup de charme, et les expositions artistiques donnent un attrait supplémentaire à leur découverte. Il serait fastidieux (et impossible) d'exposer ici toutes les œuvres d'art rencontrées sur le parcours, c'est pourquoi un choix (totalement arbitraire) d'une oeuvre par île est réalisé; il appartient à chacun d'aller voir sur place pour compléter la liste... Pour reprendre à partir d'Uno, une sculpture nommée Chinu ("Dorade noire"), érigée par Yodogawa à partir de déchets ramassés sur terre et dans les rivières, trône sur le port:
De là, il est possible de prendre le bateau pour les différentes îles, très proches, qui participent à la Triennale:
Le fait de circuler en bateau donne aussi une autre approche de cette partie du territoire japonais. Prenons la direction de Shōdoshima. Le bateau qui mène à Shōdoshima est bien reconnaissable:
Il est sobrement décoré d'un panda géant, qui tient un rameau d'olivier. L'olivier est en effet l'arbre emblématique de l'île, et les oliveraies forment un paysage peu commun pour le Japon:
Cette spécialisation agricole vient du climat du coin, présenté comme méditerranéen (en plus humide selon moi). Grâce à cela, l'olive est déclinée sous toutes ses formes: olives d'apéritif (mais sucrées; contre toute attente, c'est plutôt bon), huile d'olive (pas testée en raison du tarif exorbitant), chocolat à l'olive (même cause, même conséquence)... Faute de mieux, voici l'expérience du jour, un improbable pop-corn à l'olive:
Autre curiosité locale, l'île est parsemée de petites figurines colorées dans ce style:
Mais cela ne fait pas vraiment partie des œuvres d'art... D'ailleurs, l'exploration artistique de Shōdoshima est un peu plus compliquée que d'autres îles, car les distances sont relativement longues. Mais on peut noter l'oeuvre surprenante de Pors & Rao, Someone's coming:
En photo, ce n'est pas très impressionnant, mais il faut l'expérimenter. Puisque cette réalisation se trouve près du port, poursuivons la "route" vers Teshima. Surnommée "île-poubelle" en raison de l'accumulation des déchets industriels des îles voisines, Teshima a su redorer son blason et propose aujourd'hui une image plus bucolique. Les jardins sont verdoyants et bien entretenus:
Côté artistique, certains vestiges industriels sont intégrés à des œuvres; mais mon coup de cœur va au café Il vento, de Tobias Rehberger (le vrai titre, en allemand, est beaucoup plus compliqué). Voici un aperçu d'une des pièces:
Il s'agit en réalité d'une maison abandonnée, reconvertie en café-musée. Les jeux sur les perspectives sont étonnants, et l'atmosphère y est reposante. Quelques détails ont sans doute accentué cette sensation de sérénité, comme la climatisation ou ce délicieux thé glacé à l'olive, offert par la maison:
En repartant de l'île, le trajet en bateau permet d'admirer quelques rizières en terrasse:
L'étape suivante nous porte jusqu'à Ogijima. Bon, là, il faut être honnête, il est difficile de ne sélectionner qu'une seule œuvre (d'un autre côté, personne ne m'a obligée); alors il va falloir tricher un tout petit peu... En effet, l'île présente une telle quantité de choses à voir, en dépit de sa petite taille, que le choix n'est pas aisé. Après une intense réflexion, voici The room inside of the room, d'Oscar Oiwa:
Il s'agit d'un intérieur japonais traditionnel... mais sens dessus dessous. Qu'est-ce qui a été retourné: les murs, le sol, moi ou... la photo??? Cette œuvre se tient dans une maison abandonnée, reconvertie pour l'occasion. Une autre maison, elle aussi à l'abandon, a été transformée en kaléidoscope par Takeshi Kawashima. Mais pour ne pas dévoiler le mystère, voici seulement un aperçu des toilettes:
Sur un blog consacré aux égouts, à défaut de belles plaques, on a un autre maillon de la chaîne... Cela donne une petite idée du reste de la maison; petit bémol tout de même pour le papier-toilette, assez basique finalement. La promenade dans le petit village offre un joli panorama sur la mer Intérieure:
Et du coup, la photo permet d'apercevoir (au premier plan), les peintures de Rikuji Makabe, Wallalley (c'est la faute du cadrage). Ces murs peints se retrouvent à divers endroits sur l'île, et donnent une certaine harmonie au village. Par exemple, on regarde un jardin fleuri de lys, et hop, un mur peint derrière:
Le reste du temps, l'île est célèbre pour sa fabrique Onba (à la fois le nom de l'entreprise et de sa production: un genre de petit chariot) et ses Sakuranekos (littéralement les "chats fleurs de cerisier"). Une petite traduction est indispensable: l'onba est un véhicule non motorisé, à mi-chemin entre le caddie et le déambulateur; ce qui donne une estimation de la moyenne d'âge sur l'île. Quant aux chats, ils sont réputés être plus nombreux que les habitants, ce qui est un autre indicateur de la démographie locale. La visite de la fabrique Onba est assez intéressante:
On y trouve des onbas de tous les styles, c'est quasiment un accessoire de mode. En regardant mieux, on voit que des onbas sont garés devant quelques maisons, donnant une idée du taux d'occupation des logements (et, par déduction, du taux d'abandon aussi). Quant aux chats, une affiche explique le principe:
Les chats de l'île sont conduits chez un vétérinaire (je suppose), qui leur coupe le bout de l'oreille en forme de pétale de fleur de cerisier. C'est un signe distinctif pour les chats d'Ogijima (et probablement le seul intérêt: si cela apportait un bénéfice pour la santé des chats, ça se saurait dans un périmètre plus étendu):
Même si Ogijima montre de nombreux signes de déclin, l'île a beaucoup de charme et la population y est accueillante et chaleureuse. Un exemple: un groupe (plutôt jeune, d'ailleurs) organisait un grand barbecue près du port; lorsque je suis passée à côté, ils m'ont offert un splendide collier de fleurs (discret, cela va sans dire), que j'ai eu le droit de porter tout le reste de la journée. La dernière étape nous emmène à Megijima, juste à côté. Le dimanche en été, l'île est envahie par des familles qui profitent de la plage, non loin de Takamatsu; mieux veut prévoir un peu de souplesse pour les trajets en bateau, au cas où celui visé serait plein. Megijima a un autre titre de gloire: c'est l'île des ogres (onis). De petits ogres gentils sont là à chaque carrefour pour indiquer la direction de la grotte des ogres (plus méchants, eux):
À défaut de la vraie grotte, un peu trop loin compte tenu de la température, un peu trop haute, il est possible de visiter plusieurs Maisons d'ogres de Chaos Lounge:
Là aussi, il s'agit d'un moyen de reconquérir, sous forme artistique, des maisons abandonnées. Encore une fois, la sélection est rude, car la densité de choses à voir est incroyable. Mais comme ce n'est pas vraiment une œuvre d'art de la Triennale, mais bien une curiosité locale permanente, je ne résiste pas au plaisir de partager la sculpture la moins japonaise de la région:
Oui, c'est bien une copie de statue de l'île de Pâques qui trône à côté du port depuis 1996. Pour le reste de la visite, rien ne vaut l'expérience sur place, donc je n'en dirai pas plus... Mais il faut ensuite rentrer à Takamatsu, et là aussi, l'heure est à la fête. En effet, plusieurs œuvres sont exposées aussi dans la ville, notamment à proximité du port, comme Liminal air de Shinji Ōmaki:
Mais l'aspect sans doute le plus convivial se situe un peu plus loin, le long du port. Chaque soir, des festivités sont organisées, plus ou moins couleur locale là encore, comme ces danses hawaïennes:
Si le spectacle peut dérouter au début, il faut passer ce cap et se laisser porter par l'ambiance. On peut ensuite déguster un plat de yakisobas, mets souvent consommé dans ces soirées en extérieur:
Et là, on se retrouve plongé au cœur de la vie locale, avec ses loisirs associés aux soirées d'été. Et puis, comme toujours dans ces circonstances, on tombe forcément sur quelque chose d'inattendu:
Un talentueux artiste pastéquier (le néologisme est nécessaire: a-t-on déjà vu un sculpteur sur pastèque?) fait découvrir ses "travaux". Aucun doute, on est bien en immersion au cœur du Japon... Rendez-vous pour la prochaine édition de ce festival, en 2019!

samedi 5 novembre 2016

Narita, aéroport de Tōkyō

Aujourd'hui a été franchi le seuil des 10 000 visiteurs sur ce blog, par un(e) Canadien(ne): cela se fête! Pour l'occasion, voici un petit tour dans le ciel japonais...
L'aéroport de Narita est l'un des 2 aéroports de Tōkyō, et compte ainsi parmi les plus gros aéroports du monde. Pour autant, l'aéroport n'a rien de monstrueux et semble même plutôt hospitalier pour les visiteurs. Et quelle meilleure preuve que les égouts pour le démontrer?
Et voilà! Bon, il a fallu chercher un peu, mais avec de la volonté, on trouve... :-) Narita est en effet le principal point d'entrée des étrangers au Japon, même si l'autre aéroport de Tōkyō, Haneda, développe aussi des lignes internationales depuis quelques années. À ce titre, Narita est le hub des 2 grandes compagnies japonaises, Japan Airlines (JAL) et All Nippon Airways (ANA). Comme je prends tout en photo, j'ai bien sûr quelques spécimens de leurs avions en stock:
À première vue, cela semble banal.... Sauf que, Japon oblige, les avions sont parfois décorés de façon plus originale. Par exemple, les avions JAL qui desservent les îles du sud sont peints de sorte à se fondre dans le décor des mers du Sud:
Espérons cependant que l'avion n'ait pas vocation à plonger dans la mer... ANA n'est pas en reste, et affiche des ambitions internationales sur certains de ses avions:
Les avions peuvent aussi faire la promotion de personnages de mangas ou d'un événement sportif à l'occasion. Lorsqu'on est à l'intérieur des avions japonais, quelques indices permettent de se sentir déjà (ou encore un peu) dans le pays. En particulier, la carte qui indique le trajet est intéressante:
Ici, l'aéroport d'arrivée est "Myunhen", ce qui correspond à... Munich! Et comme le vol est un peu long (12 heures, quand même...), la partie la plus drôle consiste à essayer de retrouver le nom des villages de Sibérie au moment de leur survol: le russe retranscrit en katakana, c'est de l'art. Autre aspect dépaysant, le repas à bord. Les compagnies européennes sont d'une banalité! Là au moins, les plateaux rivalisent d'originalité, en fonction des modes du moment. Un des plus étonnants était le plateau à l'effigie de Kumamon, la mascotte de la ville de Kumamoto:
Le survol du Japon fait aussi partie du plaisir du voyage. En particulier, c'est souvent la seule occasion du séjour d'apercevoir le Fuji-San, dont le sommet émerge des nuages:
La baie de Tōkyō, avec le Fuji-San (dans les nuages, toujours) à l'arrière-plan, est aussi très impressionnante:
La côte pacifique et les rizières offrent de belles couleurs:
Lors du survol de l'océan à basse altitude, à l'atterrissage plutôt, il est possible de voir sauter des dauphins près de la côte. Dans des latitudes plus basses, les îles coralliennes dessinent parfois des formes spectaculaires. Ce lagon en forme de cœur me plaît beaucoup:
Mais le plus mémorable lors d'un passage à Narita est le rituel qui précède le décollage. La première étape obligatoire est l'escale du duty-free. Bien sûr, on y trouve tous les produits classiques (parfums, alcools...), comme dans tous les aéroports du monde. Mais on y trouve aussi un certain nombre de "japoniaiseries": manekinekos, chaussettes à 5 "doigts" (ou orteils, plutôt), porte-clefs en forme de sushi, entre autres. S'il ne faut retenir qu'un produit, le Kitkat au thé vert et à la fleur de cerisier est incontournable:
Certes, c'est un cliché; mais c'est un régal. Après cet investissement, on monte dans l'avion en se disant que le voyage est fini... ce qui n'est pas tout à fait vrai. En effet, le personnel qui a préparé l'avion accompagne ensuite son départ en faisant coucou:
Il paraît que c'est une tradition dans tous les aéroports japonais. C'est vrai dans tous ceux que j'ai pu voir. Et le spectacle n'est pas terminé. Comme on est au Japon, on ne se quitte pas sans une petite courbette:
Bon, là, c'est fini... Mais ça donne envie de revenir, non?

samedi 9 juillet 2016

Takayama, ville de "haute montagne"

La ville de Takayama, située au cœur des Alpes japonaises, est, comme beaucoup d'autres villes, représentée par des motifs fleuris sur ses plaques:
Et comme souvent, c'est l'azalée (ou rhododendron) qui est à l'honneur... Mais ici, le rhododendron est le symbole de la ville, ce qui n'est pas le cas de toutes les villes qui le mettent sur leurs égouts. Une autre plaque mise sur le gros plan:
Mais, en matière de fleurs, je n'ai pas vu beaucoup d'azalées... En revanche, la fin du mois d'avril est marquée par la fin de la floraison des cerisiers, ce qui peut donner un autre caractère aux plaques locales:
Normalement, les mini-plaques n'ont pas leur place ici, mais on peut faire une exception:
Comme on peut le deviner, les cerisiers sont sur le déclin:
En pleine floraison, la ville doit être magnifique: les cerisiers sont partout! Mais là, c'est surtout dans le caniveau qu'on retrouve les pétales:
Mais ces observations sont plus liées au hasard du calendrier qu'aux spécificités de la ville. Surnommée "petite Kyōto", l'architecture de la ville rappelle effectivement celle de l'ancienne capitale; du moins, les vieux quartiers avec leurs maisons de bois. Les ruelles sont plaisantes et invitent à la flânerie:
Afin de déambuler dans la ville, plusieurs modes de transport sont envisageables. Le vélo tient une bonne place, plutôt pour les habitants:
Pour les touristes, le pousse-pousse semble assez en vogue:
Les locaux sont donc apparemment plus sportifs que les visiteurs... Comme l'idée de faire courir quelqu'un pour moi me gêne un peu, comme d'habitude, j'ai opté pour la marche: pratique, ce mode de déplacement permet d'aller à peu près partout sans avoir à se soucier de la façon de garer sa monture. C'est ce mode d'exploration qui permet notamment de dénicher les plaques, ou d'autres bizarreries. La saison est aussi le moment de la préparation de la Fête des Enfants (Kodomo no Hi), qui se tient le 5 mai. Pour cela, des poissons volants sont accrochés un peu partout:
Quant aux bords de la rivière, malgré les fleurs, ils peinent un peu à rivaliser avec l'illustre Kyōto:
La promenade permet aussi de découvrir quelques spécialités locales. En particulier, la qualité de l'eau des montagnes permet aux brasseries de sake de prospérer:
Pour les mêmes raisons, les fabriques de miso sont nombreuses et permettent de s'initier à toutes les subtilités de cette fameuse soupe, répandue dans tout l'archipel:
D'une façon plus générale, l'agriculture de la région est riche. Du coup, de nombreux pépiniéristes proposent des articles rivalisant d'originalité et de kawaii:
Les terroirs de la montagne et le climat particulier (très forte amplitude thermique diurne) permettent aussi la culture de légumes locaux, inconnus ailleurs au Japon, mais qui font la réputation de la ville. Le micro-marché du centre-ville, très artisanal, vend ainsi des produits intéressants à observer:
L'observation est le seul attrait: impossible de savoir de quoi il s'agit, comment cela se prépare... Le stand des légumes est plus accessible; encore que:
En tout cas, c'est agréable de voir qu'il existe encore une agriculture locale, presque vivrière, avec des produits de qualité. Parce que la qualité est bien là. Les restaurants de la ville proposent une cuisine extrêmement raffinée, dans un cadre remarquable. En effet, il est possible de déjeuner dans un salon privé:
Au passage, on peut noter que les intérieurs spacieux existent au Japon! Mais le plus spectaculaire reste la succession de plats, nombreux mais en petites quantités, composés exclusivement de produits locaux. Voici un petit échantillon:
Impossible de décrire le goût, l'odeur ou la texture de ces mets; impossible même de trouver leur nom ou le nom des ingrédients, hormis le tofu et le miso! Tout est inconnu, mais délicieux et délicatement présenté. Et même si la viande de bœuf locale est assez réputée, ici le menu est végétarien. Sans être spectaculaire, Takayama est donc un endroit plein de charme, qui s'appuie sur des atouts bien éloignés des grandes villes de la mégalopole: à tout point de vue, cette escapade fait du bien!